L’empire romain de 449 n’a plus rien à voir avec la splendeur de Rome des Ier et IIe siècle. Désormais, séparé en deux, l’empire romain subit la vague d’invasions de Barbares qui ravagent et détruisent tout sur leur passage. L’empereur Valentinien III règne désormais depuis Ravenne et non plus Rome, pillée en 410. S’il parvint encore à exercer le pouvoir, il doit beaucoup à son bras armé Aetius, magister militium qui dirige les légions en Gaulle pour le moment. Sur place, il s’apprête à repousser les Huns et Attila, la plus grande menace qui plane sur Rome. Mais la puissance d’Aetius lui permet de diriger plus ou moins la Gaulle, son fief et d’y assurer sa descendance. Patrice de Rome, puissant général Romain, Aetius est l’un des derniers atouts de Rome et a déjà accompli de grandes choses avec l’empereur :
-il repousse les envahisseurs venant du Rhin et du Danube de 428 à 431 ;
-il cantonne les Wisigoths dans le Sud de la Gaule grâce à plusieurs campagnes (426, 429 et 436) ;
-il force les Burgondes à s'installer comme peuple fédéré en Sapaudia (vers 440),
Mais derrière cela, il faut y voir la réalité. La puissance d’Aetius lui donne de plus en plus d’importance et de pouvoir. La Gaulle semble se détacher de Rome de manière irrésistible mais pour le moment, l’empire est encore maîtres de cette dernière, ou du moins, de ce qu’il en reste. L’empire Romain d’Occident entre dans sa phase ultime, celle de son agonie…
En 449, l’empire romain est très affaibli. Les guerres, les famines et les épidémies ont ruiné l’économie et causé une chute importante au niveau de la population. Ainsi, la plupart des grandes villes en Gaulle romaine sont-elles en déficit démographique et avec une population sur les nerfs. Même la capitale, Noviodunum, n’est pas épargnée. Les communications avec le reste de l’empire sont difficiles et doivent soit passer par les peuples fédérés bourguignons, soit par Aurelianum qui maintient un faible corridor romain. Les finances de la gaulle du Nord ont plutôt l’air confortable, mais les chiffres sont trompeurs : l’armée romaine est très affaiblie et il faut intégralement la reconstruire. De plus, les villes ruinées doivent être réaménagées pour calmer le peuple et régénérer l’économie de l’empire. Au niveau diplomatique, Rome est en guerre avec la Thuringe. Heureusement, ceux-ci sont loin des frontières et la Gaulle peut se targuer d’être protégée par les Francs fédérés de Mérovée.
Mais les mauvaises nouvelles s’accumulent vites ! Dès le mois de février, des troubles importants éclatent dans ce qui reste de la Lyonnaise Seconde. Les cités de Rotomagus et Carocotinum s’embrasent et des heurts ont lieu dans la ville. La répression organisée par l’armée ne suffit pas à calmer les habitants et des massacres exacerbent les tensions. Par ailleurs, la vile d’Aurelianum est frappée par une nouvelle épidémie meurtrière. Il n’en faudra pas plus pour mettre à mal l’économie gallo-romaine alors même qu’Aetius tente de reconstruire une armée rassemblée près Agedincum. Après cela, on assiste à la fuite des troupes romaines des villes de Rotomagus et Caocotinum qui se sont soulevés et ont choisi un nouvel empereur à leur tête et un énième usurpateur !
Mais l’inquiétude vient aussi des Francs de Mérovée qui tentent d’exploiter la faiblesse de Rome pour pénétrer un peu plus dans la Gaulle romaine. Ainsi, certains habitants de Nemetocenna déclarent avoir vu plusieurs soldats francs s’installer durant quelques semaines devant la ville. A la limite du territoire fédéré, de plus en plus de Francs apparaissent et traversent, venant s’installer sur un territoire relevant de la souveraineté romaine mais qui de facto, relève de plus en plus de l’autorité de Mérovée. Cela est encore plus inquiétant en comparant la puissance des Francs et celle des Romains…
Furieux de ces différents affronts, Valentinien III rédige un édit qui n’en est pas vraiment un. En fait, l’empereur menace les usurpateurs et tentent de calmer les appétits des ennemis de l’empire mais aussi des peuples fédérés qui peuvent parfois se montrer très (trop ?) gourmand. Il reste dans les mémoires comme l’édit de Valentinien de mai 449. En voici un extrait :
« [L'Empereur César] Placidius Valentinianus proclame :
Ayant conscience du rôle dévastateur des usurpateurs au sein de l’empire, je déclare officielle que la lutte contre les félons sera la priorité de Rome. J’annonce donc que les rebelles ou ceux qui se disent « Empereur » seront systématiques exécutés, de même que leurs fidèles. Si il arrive qu’une ou plusieurs villes se déclarent spontanément fidèles à un autre que l’empereur dirigeant, elles pourront être rasées intégralement. […] Ainsi donc, la mort planera au-dessus des renégats par la volonté de l’empereur romain. Je mets aussi en garde un souverain étranger qui voudrait prendre la place impériale ou un roi fédéré : l’empire romain est gouverné par un empereur qui est le seul légitime. Je tiens donc à rappeler que toute personne soutenant un empereur mutin doit savoir que la mort l’attendra. […]Le présent édit à valeur de loi : l’empereur ne peut se laisser déstabiliser par des conspirations. »
Pendant ce temps en Gaulle, Aetius a pu reconstruire un embryon de forces romaines qu’il mène vers Camaracum, une ville aux mains de Romains séparatistes que le général se fera un honneur de châtier. Chassés de Rotomagus, les soldats romains reçoivent l’ordre de reprendre la ville et de la raser conformément à l’édit précédent. En réalité, Aetius veut faire un test pour voir la capacité des troupes romaines dans un assaut d’une place fortifiée. L’illustre général romain est lui-même devant Camaracum et la situation catastrophique des finances l’oblige à prendre d’assaut une des deux villes. Aetius faisant face à une ville rebelle romaine, ayant une grande armée pour la défendre, choisis d’attendre un siège conventionnel. En revanche, l’assaut est donné à Rotomagus durant l’été après 2 ou 3 mois de siège.
15 juin 449 : Bataille de Rotomagus
L’armée qui se lance à l’assaut de la ville sur la Seine est très hétéroclite. La majorité des soldats provient des troupes auxiliaires ou barbares. Il n’y a que quelques légionnaires romains ainsi que des limitanei romani. Le commandant est le comes Magnus Decimus. Celui-ci est encore inexpérimenté. Il commence par ordonner une attaque d’archers. Celle-ci vient échouer piteusement et les malheureux soldats doivent se replier sans avoir pu dépasser les grands remparts de Rotomagus mais en ayant subi 40% de pertes !
Les Romains lancent alors un assaut sanglant à l’aide d’échelles et d’une tour de siège. A gauche, un petit groupe s’empare d’un bélier pour prendre à revers les défenseurs. Alors que les premiers auxiliaires grimpent sur les remparts, le bélier défonce la porte Nord ce qui permet aux auxiliaires présents de charger. En face, les Romains de Rotomus Ier (usurpateur), alignent aussi une majorité d’auxiliaires et de sagittarii.
Les combats sont acharnés, surtout au niveau des remparts où les auxiliaires peinent grandement. Il faut l’intervention des légionnaires pour rétablir la situation. Ceux-ci, avec leur puissante armure et leur grand bouclier, sont bien plus aptes à combattre sur l’étroitesse des remparts, bien qu’ils aient aussi plus de risques de chute. Bientôt, les Romains marchent littéralement sur « un sol de cadavres et de sangs. »
Ce n’est que lorsque les Auxiliaires parviennent à prendre la porte Nord que les choses s’accélèrent. Ceux-ci tentent alors de s’occuper des cavaliers et gardes du corps de Rotomus Ier. Les combats sur les remparts monopolisent une grande partie des troupes et ce ne sont donc que quelques auxiliares accompagnés des limitaneis romains qui attaquent les gardes de l’usurpateur. Malheureusement pour eux, cette cavalerie les massacre littéralement.
Ils ne sont sauvés que par l’arrivée opportune des barbares d’Agor Locke, spécialiste de la lutte contre les soldats montés, ainsi que les légionnaires avançant en rangs serrés -boucliers contre boucliers- qui repoussent les gardes alors qu’ils s’apprêtaient à poursuivre les auxiliaires en déroute. (Les barbares étaient restés en réserve en attendant le moment opportun pour attaquer et les légionnaires venaient de nettoyer une partie des murs et avaient été chargés de prêter main forte aux soldats en difficultés.) Le chef Agor locke aura même le mérite suprême de désarçonner puis de tuer le faux empereur ! Il ne reste dès lors plus qu’à nettoyer les remparts, ce qui fut fait après le retour des légionnaires.
Au centre, Agor Locke entouré de deux de ses gardes, vient de terrasser Rotomus Ier.
Particulièrement distingué : Agor Locke – Infanterie mercenaire
A participé à la bataille : Caius Manlius Stratuis – Romano Limitanei
Après la bataille, c’est l’heure du bilan. Les pertes sont lourdes, c’est une évidence. On dit que certains habitants de Lutèce purent retrouvés des corps ou du sang pendant quelques jours après la bataille. Ce qui est sûr, c’est que 900 soldats sont tombés de chaque côté. Decimus Magnus se voit d’ailleurs retiré le commandement alors que celui-ci est confié au chef Locke. Ce dernier appliquera à la lettre les consignes de l’empereur et Rotomagus sera quasiment rasée.
