Début janvier 1857
Les tensions s'accroissent dans le Pacifique, où l'ancienne grande puissance d'Espagne se frotte aux jeunes États-Unis d'Amérique. L'éclat diplomatique a lieu à propos de Guam, île espagnole depuis 1565. En fond de coulisse, on parle de visées américaines englobant jusqu'aux Philippines, où des révoltes ont éclaté.
Les mois d'hiver me permettent de raviver une tradition un peu endormie: la chasse aux investisseurs. J'invite Frederick Arthur George Room à un dîner entre hommes de qualité. Au menu:
Tourteau froid.
Oeufs à la gelée au porto.
Turbot grillé, sauce béarnaise.
Rougets au four et au fenouil.
Haricots verts au beurre, champignons sautés.
Fraises melba.
Café liégois.
Desserts.
En effet, personne ne s'intéresse aux régions montagneuses du Tyrol, et il faut un peu forcer la main à cet entrepreneur fixé sur les chiffres pour y faire construire des chemins de fer. Les frais sont lourds, les défis techniques considérables. Ne serait-ce pas pour autant une belle pièce de filet à prendre à M. Budi-Budi?
Nous finissons par nous entendre, j'ai malgré tout l'impression de mettre endetté d'une faveur envers cet homme.
Fin janvier 1857
L'empire d'Autriche est secoué par des vagues nationalistes. Le Frioul est en feu, en rébellion ouverte et armée!
Les Hongrois ne baissent toujours pas les bras non plus, des manifestations ont dégénéré et fini en pillages, de nombreux magasins et boulangeries seraient concernés.
Pourtant, le pays dans sa majorité est plutôt calme, une réitération des évènements de 1848 ne semble pas en vue.
Notre réponse: une démonstration de force! L'armée règlera le problème, et les causeurs de troubles seront exécutés séance tenante.
Début février 1857
La poudre calme les ardeurs des révolutionnaires! La révolte du Frioul est écrasée, des procès sommaires contre les chefs de file ont lieu, les moins courageux se sont sauvés et cherchent refuge en Sardaigne-Piémont, lieu d'asile pour tous les fauteurs de troubles.
La grève continue cependant en Hongrie, il faudra remettre une couche bientôt. Aux portes de notre empire, on rapporte que des champs de pétrole de taille considérable ont été découverts. Des professeurs de l'université de Prague confirment que l'on pourrait bientôt en extraire du pétrole à prix imbattables par rapport à l'huile de baleine.
Fin février 1857
Offensive diplomatique! Nous resserrons les liens avec l'Allemagne et l'Amérique latine. En raisons de nos contacts plus réguliers avec les pays de cette dernière, un nouveau département "Amériques" est créé au sein du ministère des affaires étrangères, sous la direction du comte László Szogyény-Marich de Magyar-Szogyén et Szolgaegyháza. Le comte von Efelleturm voit en lui un concurrent et se montre réservé quant à cette promotion.
À peine ce rebalancement très relatif de nos priorités diplomatiques entrepris, que nous apprenons que le Hesse-Darmstadt a déclaré la guerre à la France! Nos diplomates auraient-ils oeuvré de manière trop appuyée, poussant dans ce conflit dantesque cette petite principauté?
Nous ne sommes même pas sûrs que le Hesse-Darmstadt rejoigne bien officiellement notre alliance. En tous cas, un passage s'ouvre vers la Bavière si la France décide d'envahir ce territoire. Les armées dans le Wurttemberg sont mises en alerte, et l'armée von Schlik stationnée en Hongrie est mise en marche vers la Bohême.
Début mars 1857
Ah, c'était prévisible, l'ogre français se jette sur la frêle victime de Hesse-Darmstadt! Nous n'attendons pas les débouchés de nos tractations sur le droit de passage et lançons nos trois armées dans la fournaise pour repousser les attaquants, qui menacent la Franconie.
Les centaines de milliers de couronnes dans notre trésor sont mis à bon usage, une nouvelle armée sera levée en Hongrie.
Ce sont surtout les biens manufacturés qui manquent en ce moment et freinent le développement de l'armée. Un manque signifie toujours une occasion de profit, et ainsi M. Budi-Budi en profite pour annoncer la construction d'une scierie à Hermannstadt. Nul doute qu'elle alimentera une usine de meubles à venir.
La Prusse, avec lesquelles nous entretenons toujours d'excellentes relations, s'en prend une fois de plus à la Belgique, alors qu'elle n'a toujours pas négocié un accord de paix avec les Pays-Bas. En voilà qui veulent affirmer leur puissance militaire avec de gros sabots.
Fin mars 1857
Le 9 mars, une bataille rangée de très grande ampleur a lieu à Darmstadt, au Sud de Francfort sur le Main. Les colonnes d'attaque autrichiennes ont repéré une faiblesse dans le dispositif du maréchal Armand Jacques Leroy de Saint-Arnaud, et l'exploitent impitoyablement. Jetant ses réserves à la va-vite vers le centre de la bataille, le maréchal perdra peu à peu sa maîtrise du champ de bataille. Les hussards font des miracles et sabrent sans pitié les fuyards. En fin de journée, les chasseurs parviennent à capturer une grande partie du parc d'artillerie et du train de ravitaillement. C'est une grande défaite pour la France.
La presse parisienne mettra particulièrement en exergue le sacrifice de quatre régiments d'infanterie de marine, qui auront peut-être évité le pire, à savoir la désintégration complète de l'armée durant sa retraite.
Nous nous sommes par ce succès assurés une place de premier choix pour notre dispositif défensif! C'est ce que me raconte, triomphant, le comte von Universz, général d'infanterie en retraite et toujours présent quand il s'agit de trinquer à la Hofburg. S'il n'y avait pas ces satanés diplomates, il aurait sûrement raison. Car ce que me rapporte le comte von Efelleturm est saisissant: le Hesse-Darmstadt nous enjoint de retirer ses forces de son territoire et de nous replier vers la Franconie! Incroyable!
Nous voilà donc forcés de nous installer de l'autre côté de la frontière, à attendre que les Français reviennent! En voilà une manière de dire merci ... Découragé par cette attitude incompréhensible, je prends à peine note de la dépêche m'indiquant le début d'une guerre entre les États-Unis et l'Espagne.
Début avril 1857
La France reprend le contrôle du Hesse-Darmstadt, à la bonne heure. Sans trop s'avancer pourtant, seuls quelques régiments s'occupent de l'opération, aucune armée de taille ne se met en mouvement. Nos espions nous rapportent que des wagons remplis de troupes ne cessent de circuler vers l'Est de la France, et que l'empereur Napoléon III prévoit une grande offensive. Les armées autrichiennes elles se réorganisent en Franconie, en attente de la prochaine bataille.
Fin avril 1857
Un corps français en Bucovine! Incroyable, et pourtant nos garnisons veillent. L'attaque rapide du général Pierre Bosquet se soldera par un échec retentissant.
Mais d'où viennent donc ces ennemis, sortis du néant? Le comte von Efelleturm doit fouiller longtemps avant de trouver une explication: les Russes ont donné un droit de passage à la France. Trahison!
Une armée est dépêchée sur place pour intercepter ces rustres. Heureusement, la Hongrie est bien dotée en troupes. À part quelques nouveaux réseaux télégraphiques en Hongrie orientale, peu de nouvelles.
Début mai 1857
La Bucovine tient ferme ...
et le duc zu Schwarzenberg arrive à la rescousse, plus que quelques jours!
Cette guerre prend toutefois un tournant singulier. Maréchal frais émoulu, François Certain de Canrobert a réussi un tour de passe-passe en s'insérant dans les lignes autrichiennes en Franconie avec une petite troupe. Des combats sanglants s'annoncent ...