En temps de paix, les intrigues de palais ont la vie belle. Pas question cependant de duper le Riksråd, une institution qui a fait ses preuves au cours des siècles.
La monarchie, le pilier du pouvoir de l'Union, a de multiples facettes utiles. La possibilité de sceller des mariages fructueux par exemple, comme celui avec la France, dotant le roi d'une épouse plus que capable, et préparant le terrain pour une alliance qui s'officialise immédiatement après.
L'alliance avec la France porte le risque d'être mêlé aux inextricables affaires du Saint-Empire, mais peut être une garantie de survie lorsqu'il s'agit d'affronter l'Angleterre. Une option qui parait réaliste aux alentours de 1530, car la défaite de l'Écosse face à son voisin briton s'est soldée par un traité de paix avec la France. Patience, donc, et mettons le temps de préparation à profit.
Orkney, notre tremplin vers l´Écosse, est trop pauvre pour alimenter une large garnison. L'Union de Kalmar redirige donc moyens financiers, privilèges fiscaux divers et variés, ainsi que moults monopoles de commerce vers cette île pour en faire une base logistique viable. Grâce à ces investissements considérables, Orkney devient un second centre économique à côté de Copenhague – gardé par jusqu'à 31 000 soldats.
Le Danemark est un peu en marge des grandes puissances d'Europe, toujours sur le point d'être dépassé par un concurrent. Espérons que nos alliés et l'intégration de la Suède fortifient ces pieds d'argile.
La Suède, parlons-en, car la grogne y est grande. La noblesse apprécie peu les visées d'unification danoises, craignant pour son pouvoir. Un peu d'or devrait alléger le poids de leur fierté.
L'art de la guerre change brutalement en Europe, le rôle des chevaliers se relativise, celui des piquiers gonfle. Gonflés, voilà ce qui caractérise peut-être le mieux l'archétype du lansquenet, aux autours vantant sa masculinité et sa richesse. Une mode discutable, qu'il convient cependant d'adopter pour le salut de nos armées.
En attendant des progrès dans l'intégration de la Suède, des efforts supplémentaires sont entrepris pour que les Norvégiens se sentent à l'aise dans le Royaume du Danemark. Les édits royaux sont systématiquement traduits en norvégien, et tout juge travaillant dans les provinces norvégiennes se doit de parler la langue du pays, et d'y appliquer les us et coutumes locaux. Les rouages de l'administration une fois huilés par ce fluide social, les thèmes plus délicats tels que l'imposition se laissent régler avec moins d'accrocs. Les revenus augmentent, la résistance à la tutelle danoise s'endort.
L'hérésie s'enracine dans le Saint-Empire et l'Angleterre. Pour l'instant, les garde-fous aux portes du royaume tiennent bon, et le clergé veille aux bonnes moeurs. À terme, ce soi-disant "protestantisme" pourrait devenir un problème considérable, car Brème et Emden en sont deux centres particulièrement actifs.
À temps pour des plans plus ambitieux, la chambre des vêtements est réorganisée et adaptée aux besoins actuels de la marine. Un système hautement efficace permet de limiter la corruption et incidemment les coûts d'entretien de notre large marine.
Un avantage de poids pour le conflit à venir. Il n'y a plus à hésiter, le traité de paix franco-anglais est lettre morte, 42 000 hommes et des douzaines de navires attendent le signal royal pour s'engager dans le Pentland Firth, afin de surmonter la courte distance vers le comté de Caithness, en Écosse. Quelques promesses faites à la France nous assurent de son soutien, mais il faudra néanmoins prendre en compte les alliés anglais, dont le Portugal et la Frise. La Pologne ne se sent pas concernée et refuse de soutenir notre attaque, qui en effet ne leur apporterait pas grand-chose et viderait dangereusement les forts faisant face à la Moscovie.
La surprise permet d'occuper rapidement quelques territoires. Une première bataille de taille à Aberdeen, houleuse, consacre un étendard danois victorieux.
La flotte anglaise est elle aussi bien trop faible pour faire face, elle entasse les défaites et est rapidement éliminée comme facteur nocif. Au milieu de ces nouvelles réjouissantes, l'annonce d'un pacte nauséabond entre nobles suédois et Moscovites frappe Copenhague comme un éclair, d'une force telle que Gorm l'Ancien a dû se retourner dans sa tombe.
Le soutien moscovite coupe net toute tentative d'intégration de la Suède. C'est bien simple, le poids militaire ainsi assuré à une potentielle rébellion est énorme. Les Suédois ne vont pas jusqu'à trahir de la Danemark au milieu de la guerre avec l'Angleterre, mais c'est bel et bien une guerre intestine de très large ampleur qui attend tout roi danois dès la paix signée à l'Ouest.
Une paix rapide n'est de toutes manières pas en vue: les lords anglais ont levé de nouvelles troupes et forcé les Danois à une bataille rangée. Le comte Abel Lovenorn y perd son honneur et 13 000 hommes, réduisant en poussière tout espoir de victoire à la force des épées nordiques. La flotte couvre aussi bien que possible une retraite hâtive vers Orkney, intouchable en raison de la suprématie navale danoise.
Et la France? Elle s'occupe de mettre à mal les alliés anglais, marchant sur Trèves, Verden et Lisbonne, refusant de courber l'échine.
Au milieu de ce chaos, n'oublions pas d'évoquer les discrètes démarches à la cour de Cracovie, en vue d'installer un successeur danois au trône polonais, à grands renforts de dîners généreusement arrosés.
1533: Trèves en flammes implore une paix immédiate. Elle est accordée au prix de nombreux ducats. La situation reste grave, la fine crème de la noblesse danoise est appellée à Copenhague et priée d'organiser une levée exceptionelle. Près de 9000 paysans danois sont grattés sur la province pour manier la pique.
L'Angleterre a du mal à tenir le rythme, elle reste pourtant maîtresse de ses terres, et les bras danois se fatiguent eux aussi doucement de porter (et d'encaisser) des coups.
Ce n'est pas le moment pour s'embarquer dans des procès de justice sans fin ...
Février 1535: la Frise capitule et injecte de l'or ô combien nécessaire dans les artères de armée. Lisbonne est assiégée par les Français, et hisse le pavillon blanc par manque de nourriture. L'Angleterre perd un allié précieux.
Verden finit aussi par se rendre. Changement de stratégie: la suprématie navale danoise est désormais un monople incontesté. Les caraques musellent les côtes anglaises dans leur intégralité, et une lettre après l'autre vole vers Paris, enjoignant les Stuart à débarquer sur le sol anglais, car les Danois sont toujours bloqués à Orkney et pourraient profiter d'une diversion. La pression monte.
1537: Londres est tombée, le duc de Normandie festoie dans le Tower. Le roi d'Angleterre demande la paix et veut céder Inverness et Aberdeen. Nous refusons, il y a un avantage à exploiter, et la guerre fut trop longue pour se contenter de si peu. La paix ne viendra qu'en 1538 et sera bien plus lourde à porter.
État des lieux après cette sanglante confrontation: 800 000 ducats de dettes, des armées danoises décimées, une flotte encore intacte, la Suède immobilisée par la Moscovie, et ... une alliance perdue avec la France. Cette dernière nous a soutenu en voulant des gains territoriaux, mais a refusé toutes les propositions danoises d'annexer une partie de l'Angleterre. Un cercle vicieux qui a sonné le glas de cette alliance, et lie le Danemark encore plus étroitement à la Pologne, désormais dirigée par August Ier Stuart, un cousin du roi du Danemark.
Cette situation fragile, l'Empire Ottoman entend bien l'exploiter. Impossible de refuser de l'aide à notre cousin, le Danemark se traine vers une nouvelle guerre ...