East Prussia 1914
Posté : jeu. mai 10, 2018 2:23 am
Dans les discutions de bistrot certains se posaient la question suivante: mais qui joue encore au JTS ?
Et bien voilà deux vieux grognards qui s'y remettent :
East Prussia 1914 : Général Von Micke vs Général Pretatov
Le théatre de la bataille :
Pologne du Nord Est aujourd'hui. A l'Est notre carte s'arrête à Kaunas en Lituanie et à l'ouest à Gdansk. Au sud une ligne qui met Varsovie à 70 km.
En 1914 et encore largement aujourd'hui de nombreux lacs, forêts et cours d'eau. Quant aux voies de communication voici se qu'en disait Ludendorff :
Le général Ludendorff observe, dès 1914, que les mouvements des forces allemandes sont considérablement gênés par l'état des routes polonaises :
"Les mouvements des troupes dépendaient au plus haut point du ravitaillement. Les conditions de celui-ci étaient aussi défavorables que possible, par suite de l'état indescriptible des chemins et du mauvais temps. La grande route de Cracovie à Varsovie était, elle-même, défoncée jusqu'à hauteur du genou. Un pied de boue la recouvrait. Les travaux nécessaires à la réfection et à la mise en état des chemins étaient énormes." ( Wikipédia)
Préambule De Micke :
Le 1er août 1914 l’Allemagne déclare la guerre à la Russie, deux jours plus tard à la France. Du côté allemand le plan Schlieffen est immédiatement appliqué. L’effort principal est porté contre la France, puis une fois la France vaincue, l’armée allemande doit se redéployer contre la Russie. Les Allemands misent sur une lente mobilisation de l’Armée russe qui, d’après leurs calculs, n’interviendra au mieux que 70 jours après sa mobilisation. A la grande surprise des Allemands, dès le 6 août, la frontière est franchie par plusieurs divisions de cavalerie russe. Pour honorer une promesse faite à la France les Russes attaquent en force dès J + 15 avec 2 armées même si elles n’ont que 80 % de leur effectif nominal. Les Allemands n’avaient pas réalisé qu’entre 1905 et 1914 les Français avaient investi des millions de francs or en Russie (les fameux emprunts russes) pour améliorer et construire des voies de chemin de fer afin d’accélérer le transfert des troupes sur les frontières.
Sur les frontières est de l’Empire allemand la seule VIIIeme armée protège la Prusse Orientale avec 6 divisions d’active intégrées dans 3 corps (I, XVII, XX) un corps de l’armée de réserve avec 3 divisions (Ier de réserve), une division de cavalerie, et l’équivalent de 5 divisions de landwehr (territoriaux)
La VIIIeme armée est dirigée par le général Maximilien von Prittwitz und Gaffron. Il a 66 ans, de caractère plutôt timoré. Il est écrasé par l’ampleur des défis qui l’attendent. Il est secondé par son chef d’état-major, l’ambitieux lieutenant-colonel Max Hoffman, un homme de 45 ans. Le Ier corps est commandé par le général von François, un descendant de huguenot, un personnage bouillonnant et incontrôlable, n’ayant aucune estime pour son chef. Von Mackensen commande le XVIIeme corps. L’homme jouera 2 ans plus tard un rôle décisif dans l’invasion de la Roumanie.
Le plan de von Prittwitz est de regrouper ses Ier et XVIIeme corps derrière la rivière Angergap pour faire face à la Iere armée russe qui avance vers l’ouest. Le seul XXeme corps doit retarder la IIeme armée russe qui se dirige vers le nord à partir de Varsovie. Le terrain favorise la défense avec des forêts épaisses, des grands lacs et de nombreuses rivières. Les Allemands peuvent aussi ancrer leur défense sur 2 forteresses : Konigsberg et Lotzen.
Von François récuse ce plan et décide seul, en contradiction avec les ordres reçus, d’attaquer la Iere armée russe à Stallupönen le 17 août avec ses 2 divisions. Les Russes sont surpris. Leur cavalerie n’a rien vu venir. Le IIIeme corps russe perd 6600 hommes, les Allemands un millier. Mais la position de von François n’est pas tenable. Les XXeme et IVeme corps russes arrivent. Von François doit se replier et rejoindre la ligne principale allemande qui s’est positionnée légèrement à l’est de la petite ville de Gumbinnen. Le général Rennenkampf, commandant la Iere armée russe continue à avancer. Le 20 août à 6 heures du matin, l’armée allemande, bien regroupée, lance une attaque générale contre les Russes.
A partir de cet instant la campagne entre le général von Micke, commandant les Allemands et le général Pretatov démarre.
Quartier général du général Pretatov à Bialystok :
20 Août vers les 4 heures du matin. Le général a fait un vilain cauchemar cette nuit et depuis son levé il marche de long en large dans ses quartiers les sourcils froncés, un truc le chiffonne. Son trouble a commencé la veille lors d'une représentation d'un petit cirque local pour les hommes de la troupe. Lorsqu'un dompteur c'est présenté avec deux lions miteux et fatigués les blagues ont fusées, épaisses, grivoises. Tout le monde riait mais pas le Général. En voyant le dompteur manipuler son fouet, le lançant au loin et d'un coup de poignet le ramenant vers les félins en une large boucle, une idée floue, un doute est apparu dans son esprit. Cette sensation n'allait pas le quitter de la journée et sa nuit fut agitée.
Cherchant à identifier son trouble le cerveau du général s'activait dans toute les directions. Il s'arrêta devant une vaste table où s'étalait un plan de la région et le plan de bataille mis au point avec l'aval de l'empereur. Son regard s'attarda sur le QG de la 2ème Armée du Général Samsonov à une grosse centaine de km à l'Ouest. Il pensait:
"Samsonov, surnom SM, un faible, j'ai pas confiance. Von Micke va lui donner des coups... des coups de fouet....cinquante nuances de russes.....Arrêtes de déconner Pretatov, reprends toi, réfléchis!"
Son regard maintenant suivait les lignes de chemins de fer disponibles pour lui et l'ennemi sur le théâtre des opérations. Il parcouru du doigt une longue ligne partant d'Est en Ouest s'incurvant ensuite vers le Sud en une longue....!?!?
Mais oui! Bien sûr. Une réalité terrible lui apparu, ses yeux s'agrandir d'horreur.
Il hurla: " Je veux une communication radio avec Samsonov, immédiatement !!!".
Quartier général du général Samsonov à Ostraleka :
Le général Samsonov raccrocha en tremblant. "Ca y est Pretatov devient dingue" pensa t-il. Un instant il pensa désobéir en en référant directement à l'empereur. Mais le ton du Général en chef, sa férocité, son urgence avait été glacial. Il abandonna cette idée.
A regret il regarda lui aussi la carte des opérations dont celle qui décrivait la situation probable et les positions atteintes dans trois jours, le 23 Août.
Il imagina ensuite le truc de fou imaginé par son boss. Au fur et à mesure qu'il y réfléchissait le serpent froid et visqueux de la terrible évidence se matérialisa dans son esprit.
A cinq heures il donna ses ordres, une activité fébrile s'empara du QG
PS: Le fameux Coup de Fouet de Hidenburg, brillant et célèbre fait partie de l'histoire tout comme le préambule de Micke.
Le reste est peut être vrai, peut être pas. Il y a des tas de façons d'éviter un coup de fouet, se cacher du dompteur, se baisser pour glisser en dessous, sauter pour passer au dessus et beaucoup d'autres manières auxquelles vous n'avez pas encore pensé.....
Et bien voilà deux vieux grognards qui s'y remettent :
East Prussia 1914 : Général Von Micke vs Général Pretatov
Le théatre de la bataille :
Pologne du Nord Est aujourd'hui. A l'Est notre carte s'arrête à Kaunas en Lituanie et à l'ouest à Gdansk. Au sud une ligne qui met Varsovie à 70 km.
En 1914 et encore largement aujourd'hui de nombreux lacs, forêts et cours d'eau. Quant aux voies de communication voici se qu'en disait Ludendorff :
Le général Ludendorff observe, dès 1914, que les mouvements des forces allemandes sont considérablement gênés par l'état des routes polonaises :
"Les mouvements des troupes dépendaient au plus haut point du ravitaillement. Les conditions de celui-ci étaient aussi défavorables que possible, par suite de l'état indescriptible des chemins et du mauvais temps. La grande route de Cracovie à Varsovie était, elle-même, défoncée jusqu'à hauteur du genou. Un pied de boue la recouvrait. Les travaux nécessaires à la réfection et à la mise en état des chemins étaient énormes." ( Wikipédia)
Préambule De Micke :
Le 1er août 1914 l’Allemagne déclare la guerre à la Russie, deux jours plus tard à la France. Du côté allemand le plan Schlieffen est immédiatement appliqué. L’effort principal est porté contre la France, puis une fois la France vaincue, l’armée allemande doit se redéployer contre la Russie. Les Allemands misent sur une lente mobilisation de l’Armée russe qui, d’après leurs calculs, n’interviendra au mieux que 70 jours après sa mobilisation. A la grande surprise des Allemands, dès le 6 août, la frontière est franchie par plusieurs divisions de cavalerie russe. Pour honorer une promesse faite à la France les Russes attaquent en force dès J + 15 avec 2 armées même si elles n’ont que 80 % de leur effectif nominal. Les Allemands n’avaient pas réalisé qu’entre 1905 et 1914 les Français avaient investi des millions de francs or en Russie (les fameux emprunts russes) pour améliorer et construire des voies de chemin de fer afin d’accélérer le transfert des troupes sur les frontières.
Sur les frontières est de l’Empire allemand la seule VIIIeme armée protège la Prusse Orientale avec 6 divisions d’active intégrées dans 3 corps (I, XVII, XX) un corps de l’armée de réserve avec 3 divisions (Ier de réserve), une division de cavalerie, et l’équivalent de 5 divisions de landwehr (territoriaux)
La VIIIeme armée est dirigée par le général Maximilien von Prittwitz und Gaffron. Il a 66 ans, de caractère plutôt timoré. Il est écrasé par l’ampleur des défis qui l’attendent. Il est secondé par son chef d’état-major, l’ambitieux lieutenant-colonel Max Hoffman, un homme de 45 ans. Le Ier corps est commandé par le général von François, un descendant de huguenot, un personnage bouillonnant et incontrôlable, n’ayant aucune estime pour son chef. Von Mackensen commande le XVIIeme corps. L’homme jouera 2 ans plus tard un rôle décisif dans l’invasion de la Roumanie.
Le plan de von Prittwitz est de regrouper ses Ier et XVIIeme corps derrière la rivière Angergap pour faire face à la Iere armée russe qui avance vers l’ouest. Le seul XXeme corps doit retarder la IIeme armée russe qui se dirige vers le nord à partir de Varsovie. Le terrain favorise la défense avec des forêts épaisses, des grands lacs et de nombreuses rivières. Les Allemands peuvent aussi ancrer leur défense sur 2 forteresses : Konigsberg et Lotzen.
Von François récuse ce plan et décide seul, en contradiction avec les ordres reçus, d’attaquer la Iere armée russe à Stallupönen le 17 août avec ses 2 divisions. Les Russes sont surpris. Leur cavalerie n’a rien vu venir. Le IIIeme corps russe perd 6600 hommes, les Allemands un millier. Mais la position de von François n’est pas tenable. Les XXeme et IVeme corps russes arrivent. Von François doit se replier et rejoindre la ligne principale allemande qui s’est positionnée légèrement à l’est de la petite ville de Gumbinnen. Le général Rennenkampf, commandant la Iere armée russe continue à avancer. Le 20 août à 6 heures du matin, l’armée allemande, bien regroupée, lance une attaque générale contre les Russes.
A partir de cet instant la campagne entre le général von Micke, commandant les Allemands et le général Pretatov démarre.
Quartier général du général Pretatov à Bialystok :
20 Août vers les 4 heures du matin. Le général a fait un vilain cauchemar cette nuit et depuis son levé il marche de long en large dans ses quartiers les sourcils froncés, un truc le chiffonne. Son trouble a commencé la veille lors d'une représentation d'un petit cirque local pour les hommes de la troupe. Lorsqu'un dompteur c'est présenté avec deux lions miteux et fatigués les blagues ont fusées, épaisses, grivoises. Tout le monde riait mais pas le Général. En voyant le dompteur manipuler son fouet, le lançant au loin et d'un coup de poignet le ramenant vers les félins en une large boucle, une idée floue, un doute est apparu dans son esprit. Cette sensation n'allait pas le quitter de la journée et sa nuit fut agitée.
Cherchant à identifier son trouble le cerveau du général s'activait dans toute les directions. Il s'arrêta devant une vaste table où s'étalait un plan de la région et le plan de bataille mis au point avec l'aval de l'empereur. Son regard s'attarda sur le QG de la 2ème Armée du Général Samsonov à une grosse centaine de km à l'Ouest. Il pensait:
"Samsonov, surnom SM, un faible, j'ai pas confiance. Von Micke va lui donner des coups... des coups de fouet....cinquante nuances de russes.....Arrêtes de déconner Pretatov, reprends toi, réfléchis!"
Son regard maintenant suivait les lignes de chemins de fer disponibles pour lui et l'ennemi sur le théâtre des opérations. Il parcouru du doigt une longue ligne partant d'Est en Ouest s'incurvant ensuite vers le Sud en une longue....!?!?
Mais oui! Bien sûr. Une réalité terrible lui apparu, ses yeux s'agrandir d'horreur.
Il hurla: " Je veux une communication radio avec Samsonov, immédiatement !!!".
Quartier général du général Samsonov à Ostraleka :
Le général Samsonov raccrocha en tremblant. "Ca y est Pretatov devient dingue" pensa t-il. Un instant il pensa désobéir en en référant directement à l'empereur. Mais le ton du Général en chef, sa férocité, son urgence avait été glacial. Il abandonna cette idée.
A regret il regarda lui aussi la carte des opérations dont celle qui décrivait la situation probable et les positions atteintes dans trois jours, le 23 Août.
Il imagina ensuite le truc de fou imaginé par son boss. Au fur et à mesure qu'il y réfléchissait le serpent froid et visqueux de la terrible évidence se matérialisa dans son esprit.
A cinq heures il donna ses ordres, une activité fébrile s'empara du QG
PS: Le fameux Coup de Fouet de Hidenburg, brillant et célèbre fait partie de l'histoire tout comme le préambule de Micke.
Le reste est peut être vrai, peut être pas. Il y a des tas de façons d'éviter un coup de fouet, se cacher du dompteur, se baisser pour glisser en dessous, sauter pour passer au dessus et beaucoup d'autres manières auxquelles vous n'avez pas encore pensé.....