
Ma très chère soeur,
je saisis la plume car il est bien temps de nous rabibocher. Je ne t'ai certes pas soutenu quand Père a décidé de te mener au couvent, mais que pouvais-je décemment dire ? Ta réputation sulfureuse avait traversé le Lot et la Dordogne, et nombre d'hommes aux jeunes étendards fièrement dressés venaient assiéger le chateau pour conquérir au mieux ton coeur, au pire ton ... enfin assez parlé de ce point.
Sache ma soeur que Père tente depuis de rallumer la grandeur des temps anciens et m'a donc mandé en le Palais de Versailles pour représenter notre famille auprès de la Cour du Roi.
Quelle étrange batisse ! L'endroit est étriqué, et la foule nombreuse, populeuse, au point que son Altesse notre Bon Roi a entamé de couteux travaux pour agrandir ce vieux pavillon de chasse. Nous n'en sommes qu'au début, et la promiscuité est encore grande : pas plus tard qu'hier, j'ai encore entaché mes robes dans la mare qu'un pisseux avait provoqué dans un des escaliers...
J'espère qu'ils ne sont pas tous ainsi ! Mais je ne les connais pas encore, tant de visages nouveaux au forts patois locaux ! je n'en ai pour l'instant remarqué qu'un, Noël du Fail, seigneur de La Hérissaye (je serais bien en peine de te dire ou se trouve l'endroit !)
Je me souviens du nom, car le Roi l'a nommé Chambellan, et nous sommes encore toute à la surprise de savoir si, demain, nous irons à la Chasse ou à Versailles ? Le Chambellan nous en fera la surprise...
Quand bien même je n'ai pas dans mes bagages de quoi suivre la Cour dans les bois, l'odeur musquée du gibier abattu pourrait presque m'emoustiller. Tout plutôt que ce palais marécageur !
Je t'embrasse fort,
ta soeur Emilie.
(Chasse ou Versailles, Chambellan ? Nous attendons le lieu, et vos ordres)