En quoi tout ça concerne-t-il les Deux Siciles?
Voilà la question que se posait Ferdinand II alors que la crise Marocaine opposant Londres et Paris se développait.
Le nœud du problème?
Abd el Kader et sa lutte contre les Français en Algérie. Ce dernier disposait en effet d'un sanctuaire, le domaine du Sultan du Maroc. Effectivement, quelle belle occasion que la rébellion de l'Emir pour gêner un voisin français aussi remuant qu'inquiétant.
En août 1844, à l'occasion d'une des nombreuses razzia de l'Emir, le Maréchal Bugeaud le poursuiva jusqu'à l'intérieur du Maroc. Le Sultan, bien décidé à protéger sa souveraineté lui opposa son armée, avec pour seul résultat une cruelle défaite.
L'affaire aurait pu s'arrêter là si le Sultan avait reconnu la présence française en Algérie et si à Paris le parti colonial n'avait pas encouragé à la conquête du Royaume Alaouite. Las, les français continuèrent leurs incursions au Maroc, provoquant l'ire de Londres.
En janvier 1845, l'ultimatum était sur le bureau du "roi des français", aux Tuileries: évacuez le Maroc, ou c'est la guerre. A nouveau, Cambronne vit son fameux mot de Waterloo utilisé, tandis que les Français étaient pris de frénésie nationaliste, revancharde et romantique. La guerre serait fraîche et joyeuse. Les fils de la Grande Armée honoreront leurs pères en vengeant Waterloo. Pour le "roi du juste milieu", l'occasion est trop belle d'enraciner la popularité de la monarchie de juillet. N'a-t-il en effet déjà pas marché dans les pas des Bonapartes en ramenant les cendres de l'Empereur sur les bords de la Seine? Tout cela, ajouté à la fièvre belliciste agitant Paris, faisait oublier à Louis-Philippe et à Thiers leurs efforts passés en vue de l'Entente cordiale.
Mais voilà, le Quai d'Orsay demande à Naples de faire jouer l'alliance existant entre les deux Etats, au plus grand dam des Deux Siciles.
En effet, pour Ferdinand II, l'affaire ne concerne guère son Royaume. Pis encore, il serait plutôt favorable aux intérêts britanniques dans la présente crise. Lui même a mis en place une politique de rapprochement avec Londres et se méfie d'une France trop puissante en méditerranée. Personne dans l'opinion ne voit le conflit de façon positive non plus. Les libéraux modérés n'arrivent pas à se départager entre Londres et Paris, les conservateurs ne veulent pas d'une aventure extérieure.
Mais... Mais la signature de ses pères figurent sur cettte alliance. Comment Ferdinand pourrait-il traîner l'honneur du royaume dans la fange en désavouant ainsi la parole donnée?
L'ambassadeur britannique fut donc convoqué pour une entrevue aussi dramatique qu'ubuesque. On pleura, on se congratula, se serra la main... Mais à l'issue de la réunion, bien que Ferdinand et ses ministres aient prostesté de leur amitié et de leur sympathie pour la cause britannique, les Deux-Siciles avaient annoncé à Londres leur soutien à la France.
Quelle stupide chose qu'une politique fondée sur l'honneur!